jeudi 7 avril 2011

Retour au point zéro. le 25.03.2011. Bribes de souvenirs du mois passé...

         Alors qu'un cobra s'est échappé du zoo du Bronx à New York, Botosani nous offre enfin son premier vrai jour de printemps. Je reprends la "plume" car enfin s'en est trop. 3 mois ont passé et le monde tombe en morceaux, terres et hommes. C'est l'agitation ici aussi mais différente. Les enfants sont tous dehors sur leur rollers et sur les bancs en petite bande. Les cours n'ont pas eu lieu depuis plus de 2 semaines pour la plupart des écoles, collèges et lycées. Les professeurs n'ont pas été payé un sou pour le mois dernier, alors à quoi bon travailler...! Ils se regroupent devant la mairie tous les matins et font du bruit mais les syndicats ne sont pas très puissants et le cours des choses va reprendre doucement la moitié d'un salaire qui sera passé à la trappe. Eh oui, à faire la grève, le gouvernement grapille ainsi afin de leur payer le mois dernier. Ils ne seront pas payés cet été non plus, ont-ils annoncé. Dorina et Monica cherchent déjà des petits boulots pour compléter. Elles n'auraient jamais pensé devoir faire cela à leur âge. C'est bien triste à voir tout cela...
Les enfants, eux, sont contents et aident leur mère à vendre des fleurs ou bien fument en cachette dans un coin. La vie continue tant bien que mal.
Autour de Botosani et partout dans le pays, les champs sont en feu depuis plus de 3 semaines. Les paysans brûlent leur terre sans contrôle ni limite malgré la loi interdisant ce procédé. Ainsi, sur la route le feu flamblent dans le fossé là tout proche et chauffe la vitre de temps à autre, et ce, nuit et jour.
En Transylvanie, la Palinka réchauffe les coeurs des villageois. Chacun amène ces prunes, pommes, poires ou même fruits de mûrier à la distillerie du village, et passe une bonne partie de l'après-midi jusqu'au soir à préparer son eau-de-vie tant chérie et appréciée, qu'ils offrent à toute personne pénétrant leur âtre aux vapeurs alcoolisées.
"Oy, Romenia", pays des douces folies et des tendres plaisirs...!
Pour mieux faire passer la dure réalité du quotidien de certains, combien de blagues, combien de jeux et d'alcools dans le sang des hommes...
Sur la route pour la Transylvanie, on a été surpris par une tempête de neige dans les Carpates. Ils nous restés plus de 200 kilomètres à faire avant la nuit et il était alors impossible de dépasser les 10km à l'heure. Même dans ces conditions, sur ces petites routes à trous enneigés et verglacés avec des tournants tous les 30 mètres, les voitures nous doublaient sans soucis ni frayeurs, aussi bien en ligne droite qu'en pleins milieu du tournant.
Bref, le calme revenu, voyant maintenant à plus de 2mètres, nous voilà qui admirons les petits villages de Bucovine.C'est un peu comme la suisse mais avec un style bien roumain. Des petites maisons éparpillées dans les montagnes avec quelques animaux et des bottes de foin rassemblés autour d'un pic de bois. Beaucoup de charrettes et de forêt de pins.
On dort à Vatra Dornei, d'où vient la bonne eau "Dorna" et on arrive le lendemain à Cluj pour l'anniversaire de Jake.
Dans la voiture, deux amis à nous, Sarah et Nico. Après quelques jours à Botosani, on commence un petit tour en Transylvanie, c'est comme un nouveau pays. Sarah regrette déjà la Moldavie...
Le soir même, Florin, notre ami violoniste tsigane, vient jouer dans un bar avec son cousin accordéoniste et pendant des heures ils jouent avec Jake le répertoire de Palatka d'où il vient. Csardas lent et rapide, Akasztos, Szokos, etc...tous des danses de couple. Et puis, il y a les danses pour les hommes, les Legénies et Korcsos, lentes et rapides aussi, où ils frappent leur corps de leur mains sur les pieds et autres et sautent partout. C'est assez impressionnant. Pendant ce temps là, les femmes sont en cercle ou en ligne derrière, et lancent à l'improviste des commentaires rythmés, souvent moqueurs, sur la performance de l'homme. Ce sont les mêmes phrases qui reviennent toujours, connus de tous car traditionnelles. En voici un exemple, traduit approximativement :
de la région Sekei :

Hujzad édes muzsikásom                               Joue mon doux et tendre musicien
Megfizetek jövő nyáron                                  Je te payerai l'été prochain
Vagy aratok, vagy kapálok                             Ou bien par la récolte ou bien en binant
Vagy egy éjjel véled hálok                             Ou bien en couchant une nuit avec toi.



Ou encore :

les garçons de Kalaka sont très beaux et dansent bien. Le seul problème avec eux, c'est qu'ils n'ont pas besoin des filles.

Il y en a des bien plus chaud, mais je vais m'arrêter là !

Encore quelques balades dans Cluj et puis on reprend la route après avoir laissé Nico repartir. Sarah est toujours avec nous et on embarque aussi Aline, boursière de la Fullbright comme Jake, elle nous a accueilli à Cluj. A notre tour de l'emmener quelques jours plus tard avec nous chez nos amis à Hausman, près de Sibiu.

Avant de quitter la région de Cluj, on rend visite à la famille de musiciens tsiganes de Sopor : Chandorika et sa femme Maria que nous avions rencontrer à Washington lors d'une fête chez des hongrois il y a presque 3 ans de cela. Après 9 ans à Washington, ils sont rentrés dans leur pays. Chandor, violoniste, fait venir pour l'occasion son beau-fils à l'accordéon que nous prenons au passage à Turda. Il y a aussi Juliu à la contrebasse et deux autres jeunes musiciens tsiganes. Réunis autour de la table dans le salon, Sarah et moi nous écoutons pendant des heures le merveilleux répertoire des musiciens de ce village. Jake joue avec eux de temps à autre.


Nous, on parle avec Maria, qui ne joue pas mais danse et nous fait visiter sa cuisine et les bons petits plats qui y mijotent. On fait une balade avec elle au coucher du soleil, les enfants du village nous suivent. C'est la gadoue parterre mais c'est agréable. Maria est belle comme tout et toute la maisonnée rayonne de chaleur en cette douce après-midi de mars. On reprend les bras chargés de Zacouska et confitures et le coeur bien réchauffé...


Sur la route le lendemain avec Sarah et Aline cette fois, on prend un petit chemin en terre escarpé et encore un peu enneigé pour se balader dans les gorges de Turda. Seuls au milieu de ces rochers à l'état brut et vertigineux, on marche sur l'étroit chemin qui longe les rochers d'un côté et tombe à pic sur la rivière de l'autre. Aline n'est pas rassurée et les ponts en bois n'aident pas, d'autant qu'on croise une plaque sur un rocher en hommage à un mort tombé du gros caillou. Je crois que c'est un mur d'escalape pendant l'été. A cette heure de l'année, c'est bien désert et les ours sortent de leur hibernation.
C'était magnifique! Regardez :
 Là où il y a la neige, c'est le chemin entre rocher et fossé...



Cette cascade de glace nous a arrêté. Impossible de la traverser. C'était déjà très beau et magique. Un peu de suspens et de mystère à suivre cet étroit pass où l'on ne sait pas où il vous mène...

Sur le détour pour nous mener aux gorges, j'ai oublié un beau moment. Une ferme sur le côté gauche de la route avec des brebis et des chèvres et leurs bébés nouveaux-nés. Aline demande à s'arrêter. Un agneau voit le jour sous nos yeux, un autre vient de sortir mais il est mort-né. Il a l'air prématuré. La vie et la mort qui se croisent. Le jeune fermier arrive et nous met des bébés dans les bras. Il prend l'agneau mort, sans doute pour donner au chien. Ca me rappelle le Puget et la Borie d'Espinet où les chevreaux tétaient mes lobes d'oreille et où on jouait à s'asperger du lait des brebis comme des pistolets.






Belle journée qui se termine avec notre arrivée à Hausman, chez Johann et Gabi et leurs 2 enfants Noa et Aaron (je suis pas sur de l'orthographe).La suite au prochain numéro...sinon, je finirai jamais sur ce mois-ci!

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire